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« Il est important de comprendre qu’il faut prendre le temps de guérir »
Bonjour, Peux-tu te présenter ?
Je m’appelle Catherine, j’ai 39 ans, je suis martiniquaise. Je suis commerciale dans un établissement financier en Martinique. J’exerce ce métier depuis bientôt 15 ans. Mon poste de travail se trouve dans une concession automobile où j’octroie des crédits aux clients qui souhaitent acheter des voitures neuves ou d’occasions.
En octobre 2013, j’ai été affecté dans une grande concession multimarque ( 9 marques) ce qui est énorme. J’y travaillais en partenariat avec 35 vendeurs automobiles. J’ai travaillé très dur et dès la fin de l’année 2014, mes chiffres ont été excellents et mes objectifs vite dépassés.
Il faut savoir que nous sommes deux (mon concurrent et moi) à avoir notre « espace financement » dans les murs de la concession. Nos procédures étant plus souples que celles de mon concurrent, les vendeurs ont tous voulu travailler presque exclusivement avec moi.
C’est à ce moment que j’ai commencé à subir mon travail.Mais je faisais encore mon métier avec beaucoup de joie et de satisfaction. Mais j’ai vite commencé à devoir effectuer de nombreuses tâches simultanément et rapidement. Il fallait recevoir les clients, répondre à tous les téléphones (fixe + 2 portables), répondre à toutes les sollicitations des 35 vendeurs et cela au quotidien. Bref, j’y arrivais tant bien que mal mais j’y arrivais…
Je me refusais à trop dépasser mes horaires. Je suis mariée et mère d’un garçon de 9 ans. Je travaillais 41h environ par semaine.
2016 a été une année exceptionnelle mais très compliquée à gérer. Mon chiffre d’affaires a explosé mais je me sentais de plus en plus fatiguée et j’avais juste envie de dire « STOP » à tout le monde. Mais la machine était en marche, difficile à arrêter…
Le 16 décembre 2016, j’ai eu mon premier malaise au travail. J’ai été arrêté 1 semaine pour malaise vagal. Le médecin a pensé à un problème d’oreille interne mais après avoir fait un bilan ORL, ce n’était pas le cas.
En 2017, je me sentais véritablement épuisée. J’ai vu mon médecin qui m’a juste donné un bilan à effectuer. Tous mes examens étaient corrects et n’ont rien montré d’anormal. Mais je me sentais vraiment vidée.
Le 23 juin 2017, alors que je recevais un client, j’ai ressenti comme un vide, j’étais incapable de parler à la cliente. Tout se bousculait dans ma tête et aucun mot n’a pu sortir de ma bouche. J’ai tenté de reprendre mes esprits en me rendant aux toilettes, mais rien à faire, j’étais incapable de recevoir tout simplement la cliente. Je ne faisais que pleurer et j’avais mes mains et la bouche engourdies. Un collègue m’a raccompagné à mon domicile. De là, j’ai contacté mon médecin qui a diagnostiqué une crise de spasmophilie. J’ai été arrêté 5 jours. J’ai repris le travail juste pour 2 jours où j’ai réussi à faire bonne figure puis je suis partie en vacances tout le mois de juillet.
Ces vacances ont été très compliquées car nous avons voyagé alors que je me sentais vraiment épuisée. J’ai été malade dès mon arrivée à l’aéroport. J’étais incapable de supporter la foule. J’avais la nausée et l’impression de m’effondrer à chaque instant. Je tenais à peine debout. J’allais mieux une fois qu’on se retrouvait tous les trois dans notre chambre d’hôtel. Mais dès qu’il fallait sortir, l’angoisse revenait. J’ai fait des crises d’angoisse pendant presque toutes les vacances. Je n’avais qu’une hâte, c’était de rentrer chez moi en Martinique. A ce stade, je ne savais toujours pas ce que j’avais. Mon mari pensait que je devenais agoraphobe. Et moi je pensais devenir tout simplement folle, j’étais complètement perdue.
De retour En Martinique, je me sentais toujours fatiguée mais je me suis persuadée que ça irait mieux et…j’ai repris le travail le 31 juillet. J’ai tenu 2 jours. J’ai été reçue par mon directeur commercial qui voulait comprendre ce qui m’arrivait. Après 2h de discussion, il m’a dit que je faisais un burn-out et qu’il ne voulait plus me voir au travail, de me faire arrêter par mon médecin le temps qu’il faudra et surtout de me reposer.
J’ai été arrêté à partir de ce jour pour 1 mois. Cette période a été très difficile car je ne pensais qu’à tout ce qui était en train de m’arriver. J’ai été prolongée 15 jours puis j’ai repris le travail. J’ai été arrêté encore 2 fois par la suite mais je voulais combattre le mal par le mal. Mon médecin m’a prescrit un mi-temps thérapeutique depuis novembre 2017. J’ai changé de concession, je suis maintenant dans une autre plus petite et je ne travaille qu’avec 8 vendeurs. Avant la fin du 1er semestre, je dois intégrer un nouveau poste sans réception de clientèle ni vendeurs à gérer.
Quels ont été vos principaux symptômes ?
Au moins de juin 2017, deux semaines avant le burn-out, je me sentais extrêmement fatiguée, j’avais la nausée le matin, je pleurais beaucoup pour rien. J’avais perdu toute motivation au travail, je me laissais porter. Arrivée chez moi, j’avais du mal à sortir de la voiture après les embouteillages. J’avais cette sensation que quelque chose n’allait pas sans savoir quoi. J’ai eu des palpitations juste quelques jours avant.
Pendant mon burn-out, tout m’épuisait, conduire, faire des courses, sortir…
Où en êtes-vous aujourd’hui ? Que mettez-vous en place pour vous reconstruire ?
Lors de mon premier arrêt de travail, le médecin m’a prescrit du Stresam, un anxiolytique assez faible. J’en ai pris pendant 3 semaines puis j’ai arrêté. Je n’ai pris ensuite que des complexes vitaminés pour sortir de cette fatigue constante, du magnésium tous les jours.
J’ai vu un ostéopathe qui a libéré tout le stress accumulé dans mon corps. J’avais les cervicales coincées. Ça m’a fait un bien fou.
Aujourd’hui, je ne suis pas encore guérie mais je prends les choses du bon côté et je considère ce burn out comme un virage qui m’a empêchée d’aller droit dans le mur. J’en tire des opportunités, je n’aurai jamais pu changer de poste sans ce burn-out. J’ai aussi pu changer mon contrat de travail et passer à 80% et donc obtenir ma journée du mercredi.
J’ai encore toujours des troubles de la mémoire et j’ai beaucoup de mal à me concentrer. Mais je m’en accommode, je note tout pour ne pas oublier.
Tous les jours sont différents avec des hauts et des bas. Ça m’arrive encore de pleurer certains jours mais je me remets vite. Je me dis simplement qu’il y a pire que ça et que je dois au contraire dire merci que ce ne soit pas plus grave. Je profite de la vie et de ma famille, mon mari a vraiment été formidable, jusqu’à maintenant il me soutient et je partage tout avec lui.
Je vois une psychologue qui m’aide beaucoup à prendre soin de moi et à me reconnecter à l’essentiel.
Je sais que la bataille n’est pas gagnée mais chaque pas est une victoire.
Un conseil que tu donnerai…
Il est important de comprendre qu’il faut prendre le temps de guérir, il ne faut pas être pressé. C’est vraiment une très longue guérison. Mais surtout, rien ne doit plus être comme avant, car si le burn-out est arrivé c’est bien la preuve que j’étais dans le faux, je pensais bien faire en faisant autant mais je ne faisais que m’éteindre au fur et à mesure. Il faut lever le pied au boulot, ne pas hésiter à s’arrêter de temps en temps pour se reconnecter à la réalité. La vie est belle et on se doit d’en profiter.
J’ai eu beaucoup de chance car j’ai été bien entourée. Ma direction me soutient aussi jusqu’à maintenant, mon directeur s’est excusé en me disant qu’il ne réalisait pas le poids que j’avais sur mes épaules car je ne montrais rien de ma souffrance. Mon burn-out a fait réagir de nombreux collègues et le bien-être au travail a été évoqué dans bon nombre de réunions depuis.
J’ai porté mon témoignage en réunion CHSCT afin que cela puisse aider mes collègues. D’autres cas possibles de burn-out ont été détectés et pris en charge par la direction.
J’espère que j’ai pu aider par mon présent témoignage car tous ceux que j’ai lu sur ce blog m’ont beaucoup aidés.
Bonne continuation à tous !
Merci à Catherine pour ce partage, n’hésitez pas à lui laisser un commentaire en retour 🙂
Prenez soin de vous
niko